Comment le Tribunal est saisi d'une plainte de représailles

Protection contre les représailles. Votre droit, notre mission.

Ceci est un document en évolution constante, modifié en fonction de l’évolution du droit. Il est publié uniquement à titre d’information générale et ne représente pas nécessairement l’opinion du Tribunal ou de ses membres.

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Table des matières

Introduction

Ce guide donne une vue d’ensemble de la manière dont une plainte de représailles, déposée par un fonctionnaire, parvient au Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (le Tribunal) et explique, de manière générale, le déroulement des audiences du Tribunal. Dans le présent document, il est question de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles Note de bas de page 1 (la Loi), des Règles de pratique du Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensiblesNote de bas de page 2 (les Règles) et de la jurisprudence.

Aperçu de la Loi

La Loi a créé le Tribunal parmi un ensemble de mesures de protection au sein de la fonction publique pour favoriser la divulgation d’actes répréhensibles. Plus précisément, le Tribunal a été établi afin de protéger des représailles les fonctionnaires qui divulguent des actes répréhensibles. Le Tribunal est un organe quasi judiciaire indépendant et sa procédure s’apparente à celle d’un tribunal judiciaire. Le Tribunal est constitué d’un président et de deux à six autres membres (paragraphe 20.7(1)). Tous ses membres sont nommés par le gouverneur en conseil, parmi les juges de la Cour fédérale du Canada ou de la cour supérieure d’une province. Le Tribunal est doté de vastes pouvoirs en vertu desquels il peut recueillir des témoignages, accorder réparation aux plaignants et ordonner la prise de mesures disciplinaires à l’encontre de ceux qui ont exercé des représailles contre les divulgateurs d’actes répréhensibles.

Le Tribunal n’est pas un tribunal auquel on peut accéder directement. Les plaintes de représailles motivées par la divulgation d’actes répréhensibles doivent être portées devant lui par l’intermédiaire d’une demande du commissaire à l’intégrité du secteur public (le commissaire).

La Loi précise les étapes du processus établi pour protéger les fonctionnaires qui divulguent un acte répréhensible. Pour effectuer une telle divulgation, un fonctionnaire peut choisir soit la voie interne, soit la voie externeNote de bas de page 3. Il s’agit d’un changement par rapport à la manière traditionnelle de divulguer les actes répréhensibles, suivant la « filière hiérarchique ». La Loi crée donc un système élargi de protection des divulgateurs au sein de la fonction publique en permettant que de telles divulgations se fassent à divers niveaux et à diverses étapes.

Trois choix s’offrent au fonctionnaire qui souhaite faire une divulgation protégée :

  • à l’interne, en communiquant les renseignements à son supérieur hiérarchique ou à l’agent supérieur désigné par son ministère ou son organisme (article 12);
  • à l’externe, en communiquant les renseignements au commissaire (paragraphe 13(1));
  • en faisant une divulgation publique s’il n’a pas suffisamment de temps pour divulguer par les deux voies ci-dessus une infraction grave à une loi fédérale ou provinciale, ou s’il y a un risque imminent, grave et précis (paragraphe 16(1)).

Processus interne : S’il opte pour le processus interne, le fonctionnaire peut faire la divulgation à son supérieur hiérarchique ou à un agent supérieur désigné (c.-à-d., un agent nommé en vertu de la Loi pour recueillir de telles divulgations) tout renseignement susceptible de démontrer qu’un acte répréhensible a été commis ou est sur le point de l’être, ou tout renseignement pouvant indiquer qu’il lui a été demandé de commettre un tel acte (article 12).

Processus externe : Pour divulguer un acte répréhensible, un fonctionnaire peut aussi opter pour le processus externe en s’adressant au commissaire (paragraphe 13(1)). Si le fonctionnaire a des motifs de croire qu’il a été victime de représailles après avoir fait une divulgation (peu importe qu’il l’ait fait au moyen du processus interne ou du processus externe), il peut déposer une plainte auprès du commissaire (article 19.1).

Lorsqu’une affaire porte sur l’exercice de représailles en réponse à une divulgation d’actes répréhensibles, le processus externe comporte deux étapes. La première est le dépôt d’une plainte auprès du commissaire. La seconde est la présentation par le commissaire d’une demande auprès du Tribunal, mais il faut pour cela que le commissaire estime qu’une telle demande est justifiée.

Seul le commissaire peut présenter une telle demande au Tribunal et, là encore, seulement après avoir décidé de recevoir la plainte et avoir fait enquête. L’enquête est menée par le Commissariat à l’intégrité du secteur public (le Commissariat). Si, après réception du rapport de l’enquêteur, le commissaire considère qu’il y a lieu de saisir le Tribunal, il peut demander à celui-ci de décider si des représailles ont été exercées à l’encontre du plaignant.

Divulgation publique : Dans certains cas, la divulgation peut être faite publiquement : à savoir s’il n’y a pas suffisamment de temps pour que la divulgation soit faite à l’agent supérieur désigné, au supérieur hiérarchique ou au commissaire ou si l’acte ou l’omission en question constitue une infraction grave à une loi fédérale ou provinciale ou pose un risque imminent, grave et précis pour la vie, la santé ou la sécurité humaines ou pour l’environnement (paragraphe 16(1)).

Comment le Tribunal est-il saisi d’une plainte de représailles?

La plainte ne peut pas être directement portée devant le Tribunal. L’instance du Tribunal ne commence qu’après réception d’une demande du commissaire. La demande du commissaire donne compétence au Tribunal de traiter une plainte de représailles (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires (2011-TP-01; et 2011-TP-04, au paragraphe 43).

Ce processus à deux étapes ressemble à celui qui existe dans le régime légal prévu par la Loi canadienne sur les droits de la personne (Tableau de comparaison avec la LCDP). Dans chacune de ces lois, le législateur a créé une commission qui joue le rôle de « gardien », chargé à la fois de recevoir et de filtrer les plaintes. Ce sont les commissions qui décident si les allégations formulées dans une plainte doivent être renvoyées devant un organisme décisionnel. Ces deux régimes ne prévoient pas d’accès direct au tribunal chargé de trancher les affaires.

Dans la décision El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires (2011-TP-01), le Tribunal a précisé les étapes qui doivent être franchies avant qu’une demande puisse être présentée au Tribunal. Au départ, il faut qu’un fonctionnaire dépose une plainte de représailles auprès du Commissariat. Le Commissariat, un agent indépendant du Parlement, a compétence exclusive pour enquêter sur les plaintes de représailles. Le fonctionnaire doit démontrer que des représailles ont été exercées à son encontre après qu’il ait fait une divulgation protégée d’actes répréhensibles.

Qu’entend-on par divulgation protégée?

Une « divulgation protégée » est la divulgation d’un acte répréhensible.

La Loi a élargi la définition qui était jusqu’alors donnée au terme « acte répréhensible » par la jurisprudence. Cette définition comprend désormais la contravention à une loi fédérale ou provinciale, ou à un règlement pris sous leur régimeNote de bas de page 4; l’usage abusif des fonds ou des biens publics; les cas graves de mauvaise gestion dans le secteur public; le fait de causer – par action ou omission – un risque grave et précis pour la vie, la santé ou la sécurité humaines ou pour l’environnement; la contravention grave à un code de conduite établi en vertu de la Loi; et le fait de sciemment ordonner ou conseiller à une personne de commettre l’un de ces actes répréhensibles (article 8).

La « divulgation protégée » est définie de la sorte à l’article 2 de la Loi :

Divulgation qui est faite de bonne foi par un fonctionnaire, selon le cas :

  1. en vertu de la présente Loi;
  2. dans le cadre d’une procédure parlementaire;
  3. sous le régime d’une autre loi fédé
  4. lorsque la loi l’y oblige.

Par conséquent, le fonctionnaire qui estime faire l’objet de représailles après avoir effectué une divulgation protégée peut porter plainte auprès du Commissariat. La plainte doit être déposée dans les 60 jours suivant la date où le plaignant a connaissance – ou aurait dû avoir connaissance – des représailles y ayant donné lieu (paragraphe 19.1(2)). Le commissaire a alors 15 jours pour statuer sur la recevabilité de la plainte (paragraphe 19.4(1)).

Qu’entend-on par représailles?

La Loi pose une interdiction générale d’exercer des représailles (article 19).

On entend par représailles l’une ou l’autre des mesures suivantes prises à l’encontre d’un fonctionnaire ou d’un ancien fonctionnaire parce qu’il a fait une divulgation protégée ou qu’il a collaboré de bonne foi à une enquête menée sur une divulgation :

  • toute sanction disciplinaire;
  • la rétrogradation du fonctionnaire;
  • son licenciement et, s’agissant d’un membre de la Gendarmerie royale du Canada, son renvoi ou congédiement;
  • toute mesure portant atteinte à son emploi ou à ses conditions de travail;
  • toute menace à cet égard.

Dans les motifs de la décision où il a rejeté une requête, El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, le Tribunal s’est penché sur la définition du terme « représailles ». Selon le Tribunal, cette définition est libellée d’une telle façon qu’une multitude de questions subtiles visant diverses formes plus ou moins graves de représailles peuvent être examinées. Toujours selon le Tribunal, la définition renferme des mots axés sur l’action, comme « mesures » et ne se limite donc pas aux décisions de personnes autorisées à les prendre (2011-TP-02, au paragraphe 79).

Il ne peut y avoir représailles qu’après qu’une « divulgation protégée » d’actes répréhensibles a été faite, que ce soit dans le cadre des mécanismes internes mis en place dans un ministère ou directement auprès du Commissariat.

Quels facteurs sont pris en compte pour décider de présenter une demande au Tribunal?

Avant de présenter une demande au Tribunal, le commissaire doit se pencher sur plusieurs questions :

  • la recevabilité de la plainte;
  • la question de savoir s’il y a lieu ou non de procéder à une enquête;
  • la question de savoir s’il est justifié de présenter une demande au Tribunal;
  • la portée de la demande dont devrait être saisi le Tribunal (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires (2011-TP-01, paragraphes 73 à 80)).

Comment le commissaire décide-t-il si une plainte est recevable?

Pour se prononcer sur la recevabilité d’une plainte, le commissaire prend en compte divers facteurs, dont la forme que revêt la plainte (paragraphe 19.1(1)), le délai fixé pour le dépôt d’une plainte (paragraphe 19.1(2)), l’existence d’autres recours prévus par une loi fédérale ou une convention collective, les limites de sa compétence et le fait que la plainte ait ou non été faite de bonne foi (paragraphe 19.3(1)).

Avant de décider de recevoir une plainte, le commissaire prend en compte un certain nombre de facteurs. Par exemple, le commissaire peut refuser de statuer sur une plainte s’il estime que :

  • l’objet de la plainte a été instruit comme il se doit dans le cadre d’une procédure prévue par toute autre loi fédérale ou toute convention collective ou aurait avantage à l’être;
  • en ce qui concerne tout membre ou ancien membre de la Gendarmerie royale du Canada, l’objet de la plainte a été instruit comme il se doit dans le cadre des recours visés au paragraphe 19.1(5) de la Loi;
  • la plainte déborde sa compétence;
  • la plainte n’a pas été faite de bonne foi.

Si le commissaire décide que la plainte est recevable et y donne suite, il transmet par écrit sa décision au plaignant et au représentant de l’employeur qui a le pouvoir d’infliger les sanctions disciplinaires relativement aux prétendues représailles (paragraphe 19.4(2)).

Si le commissaire décide que la plainte est irrecevable, il envoie par écrit sa décision motivée au plaignant (paragraphe 19.4(3)).

La Loi comprend certaines dispositions qui suspendent ou limitent les sanctions disciplinaires en attendant que l’issue de la plainte de représailles soit connue. Ces dispositions ne concernent que ceux qui auraient participé à l’exercice de représailles, et non le plaignantNote de bas de page 5.

La Loi accorde également aux administrateurs généraux le pouvoir d’affecter provisoirement à d’autres fonctions les fonctionnaires concernés par les divulgations ou par une plainte de représailles. L’administrateur général compétent n’est cependant pas tenu de procéder ainsi.

Que se passe-t-il si le commissaire décide d’enquêter sur une plainte?

Lorsque le commissaire décide d’enquêter sur une plainte de représailles, il nomme un enquêteur. Dans la mesure du possible, l’enquête est menée sans formalisme et avec célérité (article 19.7). La Loi confère au commissaire un large pouvoir discrétionnaire pour lancer ou poursuivre une enquête sur une plainte de représailles.

L’enquêteur fait connaître à l’administrateur général compétent l’objet de la plainte (paragraphe 19.8(1)). L’administrateur général doit donner à l’enquêteur accès à ses bureaux et lui fournir les services, l’aide et les renseignements qu’il peut exiger (paragraphe 19.9(1)).

Si la coopération que lui accorde l’administrateur général ou un fonctionnaire est insuffisante, l’enquêteur en fait rapport au commissaire (paragraphe 19.9(2)).

L’enquêteur peut aussi informer toute personne dont la conduite est mise en question par la plainte et lui faire connaître l’objet de la plainte (paragraphe 19.8(2)).

Pour les besoins d’une enquête, le commissaire dispose des pouvoirs d’enquête d’un commissaire nommé au titre de la partie II de la Loi sur les enquêtes (LRC, 1985, ch I-11). Cela veut dire que le commissaire peut convoquer des témoins, par assignation ou autre forme de convocation et, après avis, visiter, dans l’exercice de ses pouvoirs, des lieux occupés par un élément du secteur public (article 29).

Ajoutons que les pouvoirs du commissaire ne comprennent pas les pouvoirs conférés au Tribunal en vertu de la partie I de la Loi sur les enquêtes. Ces pouvoirs sont traditionnellement associés à des fonctions décisionnelles dans le cadre desquelles des conclusions doivent être tirées à l’égard des faits et de la crédibilité des témoins. Ces pouvoirs sont conférés au Tribunal, qui est appelé à décider en toute impartialité si des représailles ont été exercées à l’encontre d’un fonctionnaire.

Dans certaines circonstances, la plainte de représailles peut être réglée en cours d’enquête, soit en parvenant à un règlement à l’amiable avec l’agent supérieur désigné par le ministère ou l’organisme pour recevoir et traiter les divulgations, soit dans le cadre d’une conciliation proposée par le Commissariat (articles 20 à 20.2).

Si le commissaire estime que l’instruction de la plainte par le Tribunal n’est pas justifiée, il la rejette (article 20.5). Dans les autres cas, le commissaire peut conclure qu’il est justifié de présenter une demande au Tribunal.

Comment le commissaire décide-t-il s’il convient de présenter une demande au Tribunal?

Si aucun règlement n’est conclu au cours de l’enquête, le commissaire doit décider si l’instruction de la plainte par le Tribunal est justifiée (article 20.4). à cette étape, le commissaire doit tenir compte des facteurs suivants (paragraphe 20.4(3)) :

  • il y a des motifs raisonnables de penser que des représailles ont été exercées;
  • l’enquête n’a pas pu être menée à bien en raison d’un manque de collaboration;
  • il est dans l’intérêt public de présenter une telle demande;
  • la plainte doit être rejetée pour l’un des motifs pris en compte par le commissaire lorsqu’il s’est penché sur la recevabilité de la plainteNote de bas de page 6.

Par ailleurs, le Tribunal a affirmé que le seuil de preuve qui s’applique à la présentation d’une demande par le commissaire est moins élevé que la norme de preuve en vigueur utilisée par le Tribunal (voir El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-04, au paragraphe 35). Comme nous le verrons plus loin, c’est en fonction de la norme de la « prépondérance des probabilités » que le Tribunal doit décider si les représailles ont été exercées. De son côté, le commissaire a simplement besoin de « motifs raisonnables », c’est-à-dire de motifs « qui ne sont pas absurdes, qui témoignent d’un bon jugement, ou peut-être qui vont au-delà d’une simple assertion ou de simples soupçons » (voir El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-04, au paragraphe 37).

Lorsqu’il présente une demande visant à faire trancher la question de savoir si des représailles ont été exercées à l’encontre d’un plaignant, le commissaire agit en tant que partie distincte chargée de protéger l’intérêt public.

Suivant l’alinéa 5b) des Règles, le commissaire doit exposer les fondements de son avis selon lequel l’instruction de la plainte par le Tribunal est justifiée.

Après que le commissaire a déposé la demande, le registraire en avise toutes les parties (article 6 des Règles).

Quelle est la portée de la demande que le commissaire peut présenter au Tribunal?

Si le commissaire est d’avis que l’instruction de la plainte par le Tribunal est justifiée, il doit alors établir :

  • si la demande portera sur l’ensemble des allégations formulées dans la plainte ou sur seulement un certain nombre d’entre elles;
  • si des défendeurs à titre individuel devront être identifiés dans la demande ou si seulement l’employeur devra l’être;
  • s’il devra demander au Tribunal d’ordonner la prise de mesures de réparation à l’égard du plaignant, dans le cas où le Tribunal conclurait que des représailles ont été exercé
  • s’il devra demander au Tribunal d’ordonner la prise de mesures de réparation à l’égard du plaignant, et la prise de sanctions disciplinaires à l’encontre des personnes identifiées par le commissaire dans la demande, dans le cas où le Tribunal conclurait que des représailles ont été exercées (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-02, paragraphe 28).

Le Tribunal devient compétent pour instruire une plainte de représailles uniquement à la réception de la demande du commissaire (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires (2011-TP-01) et (2011-TP-04), au paragraphe 43)).

Quelle est la procédure du Tribunal lorsqu’il est saisi d’une demande?

Pour ce qui est de la procédure du Tribunal, il faut garder à l’esprit qu’il a pour mission de décider, lorsqu’une demande lui est présentée par le commissaire, si des représailles ont été exercées (articles 21.4 et 21.5).

Lorsque le commissaire présente une demande au Tribunal en vertu du paragraphe 20.4, le président du Tribunal désigne un membre qu’il charge de l’instruction. S’il estime que la difficulté de l’affaire le justifie, il peut désigner trois membres (paragraphe 21.1(1)).

Le Tribunal est un tribunal quasi judiciaire indépendant et l’instruction des plaintes se fait « sans formalisme et avec célérité dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique » (paragraphe 21(1)). Le Tribunal est largement maître de sa procédure (paragraphe 21(2)). Il peut modifier une règle ou exempter une partie ou une personne de son application si la modification ou l’exemption permet de procéder sans formalisme et avec célérité tout en respectant les droits des parties (article 3 des Règles). Cela permet au Tribunal d’adopter des moyens de procéder permettant de rendre l’instance aussi proactive que possible tant avant l’audience qu’au cours de celle-ci.

La manière dont se déroulent les instances devant le Tribunal renforce les valeurs et les objectifs de la Loi en offrant aux parties la possibilité de se faire pleinement entendre. Le Tribunal est soumis au principe de la publicité des débats judiciaires, qui est garanti par la Constitution, et les instances et décisions du Tribunal sont transparentes (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2012-TP-01). Ce n’est qu’exceptionnellement et lorsque les circonstances l’exigent que les audiences du Tribunal ont lieu à huis clos.

C’est la portée de la demande dont le Tribunal est saisi qui détermine sa compétence. Par exemple, la demande peut porter sur l’ensemble des allégations initialement formulées dans la plainte reçue par le Commissariat, ou sur seulement certaines d’entre elles. Dans la décision El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-01, le Tribunal explique que sa compétence est délimitée par les allégations contenues dans la demande. Il n’a donc pas le pouvoir de modifier la demande pour y ajouter des allégations (2011-TP-01, au paragraphe 89).

Comment les choses se passent-elles avant la tenue de l’audience?

L’enquête préalable devant le Tribunal

Avant l’audience du Tribunal, il y a la procédure appelée « enquête préalable ». Comme dans d’autres procédures civiles contradictoires, le processus d’enquête préalable, qui est expliqué dans les règles de procédure du Tribunal, permet à chacune des parties de connaître la preuve et la position des autres parties afin de pouvoir se préparer adéquatement. Ce processus comprend la production de documents et joue un rôle important en permettant aux parties de faire porter leurs arguments plus précisément sur les questions en litige. Cela permet par ailleurs au Tribunal de rendre sa procédure plus efficace, y compris le déroulement de l’audience.

Le processus d’enquête préalable commence lorsque chacune des parties présente un exposé des précisions, ce qui est obligatoire dans chacune des hypothèses suivantes :

  • La demande est présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)a) : le commissaire présente une demande visant à décider si des représailles ont été exercées à l’égard du plaignant et visant à ordonner la prise de mesures de réparation par le Tribunal si celui-ci conclut qu’il y a eu des représailles (alinéa 19a) des Règles).
  • La demande est présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)b) : cette demande vise notamment à décider si des représailles ont été exercées à l’égard du plaignant et à ordonner la prise de sanctions disciplinaires. Une telle demande comprend également les défendeurs cités et sollicite la prise de sanctions disciplinaires dans l’hypothèse où le Tribunal conclut qu’il y a eu représailles. En pareille hypothèse, le premier exposé des précisions ne porte que sur la question des représailles et non pas sur celle des sanctions disciplinaires (alinéa 19a) des Règles).
  • Le Tribunal décide dans le cadre d’une demande présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)b), qu’il y a eu représailles. Une fois que le Tribunal a décidé, dans le cadre d’une demande présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)b), qu’il y a eu représailles, et qu’il a accordé des mesures de réparation à l’égard du plaignant, un second exposé des précisions va porter sur la partie de la demande sollicitant la prise de mesures de sanctions disciplinaires à l’encontre des défendeurs cités (alinéa 19b) des Règles).

On trouvera ci-dessous de plus amples détails concernant l’enquête préalable dans chacune de ces hypothèses.

Enquêtes préalables : demande présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)a) de la Loi

Lorsque la demande est présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)a) de la Loi, les parties à l’instance sont le commissaire, le plaignant et l’employeur. Dans ce genre de demande, le commissaire ne nomme pas de défendeurs à titre individuel et ne demande pas que soient ordonnées des sanctions disciplinaires.

Cependant, le paragraphe 21.4(3) permet au Tribunal d’adjoindre une personne qui a été identifiée comme étant une personne qui aurait exercé des représailles et qui pourrait être affectée par la décision du Tribunal (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2001-TP-03, au paragraphe 44).

Le processus d’enquête préalable porte sur le bien-fondé de la demande, mais aussi sur la question des mesures de réparation à ordonner dans l’hypothèse où le Tribunal conclut que des représailles ont été exercées.

Enquêtes préalables : demande présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)b) de la Loi

Lorsqu’une demande est présentée en vertu de l’alinéa 20.4(1)b) de la Loi, les parties à l’instance sont le commissaire, le plaignant, l’employeur et un ou plusieurs défendeurs à titre individuel. L’enquête préalable comporte alors deux étapes.

La première étape est l’enquête préalable concernant la question de savoir si des représailles ont été exercées et s’il y a lieu d’ordonner des mesures de réparation. Autrement dit, il est question du bien-fondé de la demande : des représailles ont-elles été exercées à l’encontre du plaignant et, dans l’affirmative, le Tribunal devrait-il ordonner des mesures de réparation? Si le Tribunal conclut qu’il y a eu représailles, le registraire du Tribunal signifie à chacune des parties une copie de la décision motivée et les en avise (paragraphe 22(1) des Règles).

La seconde étape de l’enquête préalable concerne les sanctions disciplinaires. Cette étape n’a lieu que si le Tribunal conclut qu’un ou plusieurs des défendeurs à titre individuel ont exercé des représailles à l’égard du plaignant. Suivant le paragraphe 21.5(4) de la Loi, après avoir motivé sa décision quant à savoir si le plaignant a fait l’objet de représailles, le Tribunal peut rendre une ordonnance concernant les sanctions disciplinaires à infliger à toute personne qui, selon lui, a exercé des représailles.

Le paragraphe 22(2) des Règles fixe les délais de dépôt des exposés des précisions portant sur les sanctions disciplinaires. Le délai ne commence à courir qu’après que le Tribunal a décidé que des représailles ont été exercées à l’égard du plaignant et que les motifs de sa décision ont été signifiés aux parties.

Comment le Tribunal s’assure-t-il que ses instances sont proactives?

Comme de nombreux autres tribunaux administratifs, le Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles tire de sa loi constitutive un pouvoir général sur sa procédure. Les Règles donnent aux parties des indications sur le déroulement de l’instance devant le Tribunal, mais elles doivent être interprétées de façon libérale afin d’assurer que l’instruction se déroule sans formalisme et avec célérité et que les droits des parties sont respectés (article 2 des Règles). Au besoin, le Tribunal peut modifier une règle ou exempter une partie ou une personne de son application si la modification ou l’exemption aide à assurer que l’instruction se déroule sans formalisme et avec célérité tout en respectant les droits des parties (article 3 des Règles).

En tant que maître de sa procédure, le Tribunal a pris des mesures afin d’assurer l’efficacité et l’équité des instances. Il s’agit notamment :

  • du recours aux conférences préparatoires pour permettre aux parties de se préparer en vue de l’audience;
  • de l’utilisation, dans la mesure du possible, de recueils conjoints de documents afin de simplifier la communication des documents;
  • de l’utilisation, dans la mesure du possible, d’un exposé conjoint des faits;
  • du recours non obligatoire à des modes alternatifs de règlement des différends, comme les conférences de règlement ou la médiation;
  • de l’examen, avant l’audience, de la plupart, sinon de toutes les requêtes préliminaires.

Conférences préparatoires. En général, le Tribunal demande la tenue d’une conférence préparatoire dans les premiers temps de l’instruction, dès le dépôt des exposés des précisions et des réponses à ces exposés. Une partie peut en outre demander la tenue d’une conférence préparatoire à diverses étapes afin de clarifier certaines questions.

La conférence préparatoire est programmée avant l’audience afin que celle-ci puisse se dérouler sans retard inutile. La conférence préparatoire sert également à fixer l’ordre dans lequel les parties présenteront leur preuve et permet d’assurer le règlement de questions concernant la divulgation des preuves.

Pour de plus amples renseignements, veuillez consulter, sur le site du Tribunal, l’énoncé sur les conférences de gestion de l’instance et les conférences préparatoires.

Recueil conjoint des documents : Lorsque les parties ont eu l’occasion de déposer leurs exposés des précisions et de répondre aux exposés des précisions présentés par les autres parties, le Tribunal demande aux parties de lui remettre un recueil conjoint de documents.

Un recueil conjoint des documents supplémentaire devra être remis dans le cadre de l’enquête préalable en deux étapes décrite ci-dessus, c’est-à-dire lorsque la demande vise des défendeurs è titre individuel et lorsqu’elle vise la prise de sanctions disciplinaires. Cela n’a lieu que si le Tribunal conclut que des représailles ont été exercées à l’égard du plaignant.

Le Recueil conjoint des documents doit comprendre tous les documents que les parties entendent produire à titre de preuve, ainsi que la liste de ces documents.

Dans cette liste, les parties doivent préciser :

  • le titre du document;
  • la date du document;
  • si l’authenticité du document est reconnue;
  • si la véracité du document est reconnue;
  • si le document est visé par une ordonnance de confidentialité antérieure;
  • si l’on prévoit le dépôt d’une requête en ordonnance de confidentialité.

Pour davantage de renseignements, veuillez consulter l’énoncé sur le recueil conjoint des documents du Tribunal.

L’exposé conjoint des faits : Les parties peuvent convenir de rédiger un exposé conjoint des faits, mais cela demeure facultatif.

Conférences de règlement et médiation : Bien que cela n’ait rien d’obligatoire, le Tribunal peut aussi tenir des conférences de règlement. Dans certains cas, le Tribunal peut également envisager de recourir à d’autres modes de règlement des différends.

Requêtes : Une requête est un acte de procédure par lequel on demande officiellement à un tribunal de faire quelque chose en cours d’instance. Tout au long de l’instance, une partie peut, par requête, présenter des demandes en vertu de la Loi ou des Règles.

Par une requête préliminaire, une partie demande au Tribunal de se prononcer sur une exigence procédurale ayant trait à l’équité, à l’admissibilité d’une preuve ou aux dispositions d’une loi ou d’un règlement. Le tribunal souhaite habituellement statuer sur ces requêtes avant le début de l’audience, afin de rendre la procédure plus efficace et d’éviter qu’il lui soit, au dernier moment, demandé de reporter l’audience à une date ultérieure. Dans la mesure où une telle requête n’est pas prématurée, cela contribue généralement à l’équité et à l’efficacité des audiences.

Il existe un éventail de requêtes qui peuvent être présentées en cours d’instance. La requéte doit être présentée dans les plus brefs délais lorsqu’une partie estime qu’il y a une question sur laquelle le Tribunal devrait se prononcer. Ainsi, le paragraphe 21.4(3) de la Loi permet l’adjonction d’une partie à l’instance si le Tribunal est d’avis qu’une personne qui aurait exercé des représailles est susceptible d’être directement touchée par sa décision. Les requêtes en adjonction d’intervenants (article 12 des Règles) ou autres requêtes concernant la procédure, la preuve ou les témoignages (articles 13 à 18 des Règles) peuvent être présentés avant l’audience. Ainsi, une partie peut, par requête, demander la prorogation d’un délai prévu par la Loi ou les Règles pour satisfaire à une exigence. Dans certains cas, il peut, par requête, être demandé que le nom d’une partie soit supprimé d’une demande.

Les motifs de la décision que le Tribunal rend à l’égard d’une requête sont considérés comme interlocutoires. Le terme « interlocutoire » veut dire que les motifs de la décision ont été rendus à une étape intermédiaire de la procédure et qu’il ne s’agit pas par conséquent d’une décision sur le fond.

Dans le cadre de trois de ses décisions interlocutoires : El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-02, 2011-TP-03 et 2011-TP-04, le Tribunal a formulé des observations concernant les requêtes préliminaires présentées prématurément ou susceptibles d’empêcher la tenue de l’audience. Dans l’une de ces décisions, le Tribunal s’est penché sur la nature de la Loi, sur sa mission et sur les demandes dont il était saisi. Il a affirmé qu’il ne doit pas s’en tenir « de façon trop rigoureuse aux recours préliminaires » (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-02, paragraphe 57) tels les requêtes en jugement sommaire, car de tels recours peuvent être prématurés. Ce genre de requêtes peut en effet priver les parties de la possibilité de présenter leurs éléments de preuve et de faire valoir leurs observations. Le recours excessif aux recours préliminaires pourrait également avoir pour effet d’affaiblir l’objet global de la Loi et d’entraîner une perte de confiance dans le régime établi par la législation.

Les principales étapes de l’audience

Comme il est mentionné ci-dessus, dans l’exercice de ses fonctions décisionnelles, le Tribunal est investi de pouvoirs d’enquête plus larges que ceux du commissaire. Le Tribunal est en effet doté, pour mener ses audiences, de l’intégralité des pouvoirs d’enquête dont sont investis les juges nommés par le gouvernement fédéral. Le Tribunal peut notamment, selon les besoins, procéder à l’adjonction d’une partie (paragraphe 21.4(3)), soit de sa propre initiative, soit suite à une requête (El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-02, paragraphes 49 à 56)]. Le Tribunal a également le pouvoir d’assigner et de contraindre les témoins à comparaître et à déposer verbalement sous la foi du serment, de faire prêter serment, de recevoir des éléments de preuve ou des renseignements par déclaration verbale ou écrite sous serment et de trancher toute question de procédure ou de preuve (paragraphe 21.2(1)).

Le Tribunal peut décider si des représailles ont été exercées à l’égard du plaignant et si les actes d’une personne identifiée dans la demande du commissaire constituaient des représailles (paragraphe 21.5(1)). Si le Tribunal décide qu’il y a eu représailles, il peut ordonner la prise de mesures de réparation à l’égard du plaignant.

S’il conclut qu’il y a eu représailles et que le commissaire lui demande d’ordonner la prise de sanctions disciplinaires, le Tribunal tiendra une seconde audience portant uniquement sur la question des sanctions.

Le déroulement général de l’audience est expliqué ci-dessous de manière plus détaillée. Il s’agit notamment : 1) de l’exposé initial, de la présentation de la preuve et des conclusions finales, 2) du seuil de preuve nécessaire pour conclure qu’il y a eu représailles.

L’exposé initial, la présentation de la preuve et les conclusions finales

Dans leurs exposés initiaux, les parties présentent des observations générales sur leurs positions. Il s’agit d’un exposé général des arguments qui vont être invoqués. L’exposé initial ne constitue pas un élément de preuve et ne peut jamais être considéré comme tel. Cette étape sert simplement à permettre aux parties de décrire les éléments de preuve qu’elles entendent produire, les questions qu’elles entendent soulever et les arguments qu’elles vont faire valoir.

Après les exposés initiaux, chacune des parties est invitée à faire valoir ses arguments (articles 20.4 et 21.6).

L’ordre dans lequel les parties vont être invitées à présenter leurs arguments n’est pas obligatoire, mais le Tribunal a précisé que, de manière générale, il s’en tiendra à l’ordre dans lequel sont énumérées, à l’article 20.6 de la Loi, les personnes que le commissaire doit aviser de sa décision de présenter une demande au Tribunal. Ainsi, la première partie invitée à présenter son exposé serait le plaignant, puis l’employeur, suivi des défendeurs à titre individuel (voir les alinéas 20.6a) à d)). Les parties intéressées seront alors entendues si elles ont, au préalable, été jointes à l’instance par le Tribunal.

Lorsqu’une partie appelle ses témoins, la procédure se déroule de la manière suivante :

L’interrogatoire principal : Chaque témoin est interrogé par la partie qui l’a appelé, ou, le cas échéant, par le représentant de cette partie.

Le contre-interrogatoire : Les autres parties peuvent alors contre-interroger chacun des témoins, dans les limites que peut imposer le Tribunal.

Le réinterrogatoire : La partie ayant initialement appelé le témoin peut alors réinterroger son témoin qui a été contre-interrogé si le contre-interrogatoire a soulevé des questions que l’on ne pouvait pas prévoir lors de l’interrogatoire principal.

à la fin de l’audience, chaque partie a la possibilité de présenter ses conclusions finales. Ces conclusions résument les éléments de preuve et les arguments sur lesquels se fonde la partie en question. La partie peut également faire état de la jurisprudence du Tribunal ou d’autres instances.

Quel est le seuil de preuve nécessaire pour conclure qu’il y a eu représailles?

La norme de preuve applicable devant le Tribunal est celle de la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire que la preuve démontre que les faits allégués se sont vraisemblablement produits. Cela correspond au seuil de preuve appliqué dans le cadre d’autres procédures administratives et d’actions civiles. Notons que cette norme de preuve est moins exigeante que celle qui s’applique aux affaires criminelles, où la Couronne est tenue de prouver ses allégations hors de tout doute raisonnable.

Dans la décision El-Helou c Service administratif des tribunaux judiciaires, 2011-TP-04, le Tribunal a rappelé que le fardeau de la preuve incombe au plaignant. Le Tribunal a cependant insisté sur le fait que, compte tenu de la nature des représailles, le Tribunal pourra, dans certains cas, décider que le rejet d’une demande ne dépendra pas seulement des éléments de preuve produits par le plaignant, ou par le commissaire. Le Tribunal pourra en effet juger nécessaire d’entendre le témoignage du défendeur avant de décider s’il y a lieu ou non de rejeter la demande.

Le Tribunal a également précisé que, dans certains cas, il se peut que le défendeur ou l’employeur, ou encore les deux se contentent de nier les allégations du plaignant selon lesquelles des représailles ont été exercées à son égard. Après avoir évoqué la mission que lui a confiée la Loi, le Tribunal a ajouté qu’en pareilles circonstances, il pourra tirer des conclusions de l’absence de réponses de l’employeur, du défendeur ou des deux. Autrement dit, lorsque le plaignant ou le commissaire affirment qu’il y a eu représailles, et qu’il ne s’agit pas de simples assertions, le Tribunal peut tirer des conclusions défavorables du fait que le défendeur ou l’employeur n’ont pas présenté d’arguments ou d’éléments de preuve pour y répondre (paragraphes 50 et 51).

La question de savoir si des représailles ont été exercées

Après l’audience, le Tribunal soupèse les éléments de preuve, les témoignages et les arguments avancés afin de décider si des représailles ont été exercées (article 21.5). Si la demande vise un ou plusieurs défendeurs à titre individuel, le Tribunal doit également décider si la ou les personnes identifiées comme étant celles qui auraient exercé des représailles les ont effectivement exercées.

Au cours de l’audience, il se peut que l’on s’aperçoive qu’il y a eu des représailles, mais que celles-ci n’ont pas été exercées par la personne identifiée dans la demande. Le Tribunal peut toutefois ordonner la prise de mesures de réparation à l’égard du plaignant même si les représailles n’ont pas été exercées par la ou les personnes identifiées dans la demande.

Détermination des mesures de réparation

Les mesures de réparation susceptibles d’être accordées peuvent être adaptées aux circonstances de l’affaire. Le Tribunal peut ordonner à l’employeur, à l’ancien employeur, à l’administrateur général ou à toute personne habilitée à agir en leur nom, de prendre l’une ou plusieurs des mesures suivantes :

  • permettre au plaignant de reprendre son travail;
  • le réintégrer ou lui verser une indemnité si le Tribunal estime que le lien de confiance qui existait entre les parties ne peut être rétabli;
  • verser au plaignant une indemnité équivalant à la rémunération qui lui aurait été payée s’il n’y avait pas eu de représailles;
  • annuler toute sanction disciplinaire ou autre prise à l’égard du plaignant et lui verser une indemnité équivalant à la sanction pécuniaire ou autre qui lui a été imposée;
  • accorder au plaignant le remboursement des dépenses et des pertes financières qui découlent directement des représailles;
  • indemniser le plaignant, jusqu’à concurrence de 10 000 $ pour les souffrances et douleurs découlant des représailles dont il a été victime (paragraphe 21.7(1)).

Lors de la partie des procédures traitant uniquement de la prise de mesures de réparation, le Tribunal peut limiter la participation de la personne ou des personnes identifiées comme étant celles qui auraient exercé des représailles (paragraphe 21.6(3)).

Détermination des mesures disciplinaires

Si la demande vise des défendeurs à titre individuel et que le commissaire a demandé au Tribunal, dans l’hypothèse où celui-ci décide que les personnes en question ont exercé des représailles, que soient prises à leur encontre des sanctions disciplinaires, le Tribunal doit décider des sanctions qu’il convient d’ordonner. Seules les personnes identifiées comme défendeurs à titre individuel dans la demande peuvent faire l’objet de sanctions disciplinaires. à cette étape, outre le commissaire, sont parties à la procédure la personne ou les personnes jugées avoir exercé des représailles ainsi que toute personne désignée par le Tribunal en vue de présenter des observations en matière disciplinaire pour le compte de la personne ou de l’entité à qui le Tribunal enjoindrait d’exécuter l’ordonnance (paragraphe 21.5(5)).

Le Tribunal peut, par ordonnance, enjoindre au gouverneur en conseil, à l’employeur, à l’administrateur général compétent ou à toute personne agissant en leur nom d’infliger des sanctions disciplinaires aux personnes jugées avoir exercé des représailles. Ces sanctions peuvent notamment comprendre le licenciement ou la révocation d’une nomination (paragraphe 21.8(1)).

Avant d’ordonner la prise de sanctions disciplinaires, le Tribunal prend en compte un certain nombre de facteurs, dont :

  • la gravité des représailles;
  • le niveau de responsabilité inhérent au poste qu’occupe la personne en cause;
  • ses antécédents professionnels;
  • le fait qu’il s’agissait ou non d’un incident isolé;
  • la possibilité de réhabilitation de la personne;
  • l’effet dissuasif des sanctions disciplinaires (paragraphe 21.8(2)).

Le Tribunal doit en outre prendre en compte certains autres facteurs en rapport avec les objectifs de la Loi et notamment celui de favoriser l’intégrité des fonctionnaires. Par conséquent, le Tribunal doit également tenir compte de la mesure dans laquelle :

  • la nature des représailles a pour effet de décourager la divulgation d’actes répréhensibles;
  • l’inadéquation des sanctions disciplinaires porterait atteinte à la confiance du public dans les institutions publiques (paragraphe 21.8(3)).

La personne à qui sont infligées des sanctions disciplinaires ne peut présenter un grief en vertu d’une loi fédérale ou convention collective à l’égard des sanctions qui lui sont imposées (paragraphe 21.8(4)).

Le contrôle judiciaire des décisions du commissaire et des ordonnances et décisions du Tribunal

Les décisions du commissaire sont définitives. La seule façon de contester une décision du commissaire quant à la manière dont il a traité une plainte est de présenter une demande de contrôle judiciaire en Cour fédérale. En vertu du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales (LRC 1985, ch F-7), une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par toute personne directement touchée par la décision d’un office fédéral.

Par exemple, une personne pourrait être mécontente de la décision prise par le commissaire à l’égard d’une plainte de représailles, que ce soit au niveau du filtrage de la demande, de sa recevabilité, de l’enquête ou du renvoi de la demande devant le Tribunal, ou encore de la portée de la demande (p. ex., dans l’hypothèse où la demande ne fait état que de certaines des allégations formulées dans la plainte). En pareil cas, la personne directement touchée par la décision peut présenter une demande de contrôle judiciaire en Cour fédérale. Les décisions du Tribunal, elles, peuvent faire l’objet d’un contrôle judiciaire par la Cour d’appel fédérale (article 51.2 de la Loi et alinéa 28(1)q) de la Loi sur les Cours fédérales).

Les motifs justifiant une demande de contrôle judiciaire d’une décision du commissaire ou du Tribunal sont énumérés au paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales et comprennent notamment le fait que l’office fédéral en cause :

  • a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou refusé de l’exercer;
  • n’a pas observé un principe de justice naturelle ou d’équité procédurale;
  • a rendu une décision ou ordonnance entachée d’une erreur de droit;
  • a rendu une décision ou ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;
  • a agi ou omis d’agir en raison d’une fraude ou de faux témoignage;
  • a agi de toute autre façon contraire à la loi.

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